A RETENIR :
– Il est possible de se brosser les dents en diminuant la consommation de plastique.
– Un certain nombre de principes doivent toutefois être respectés pour garantir la santé des gencives et des dents.
– La dureté des poils doit toujours être adaptée à la gencive : les brosses à dents souples sont à privilégier.
– Le dentifrice doit contenir du fluor, à défaut de quoi le risque de voir apparaître des caries augmente fortement.
Le brossage des dents tel que nous le connaissons aujourd’hui pose un problème écologique, car il recourt à de nombreux dispositifs en plastique jetable. Or nous savons désormais que ce plastique jetable se retrouve en grande partie dans les océans. Les quantités de déchets en plastique ne cessent de croître, ce sont jusqu’à 8 millions de tonnes de plastique qui sont déversées dans les océans tous les ans (source : Le Monde du 9 juin 2020) : le changement de comportement devient urgent !
Il est aujourd’hui possible de diminuer la quantité de plastique jetable qu’on utilise pour se brosser les dents. Mais ce n’est pas encore chose aisée en 2020, comme nous allons le voir. La loi Egalim du 2 octobre 2018 interdit progressivement les produits en plastique, jetables et à usage unique, mais cette interdiction ne concerne pas les produits de santé, type blister de médicaments ou brosses à dents. Ainsi, la majorité des brosses à dents disponibles sur le marché a encore un manche en plastique, et la quasi-totalité des dentifrices sont conditionnés dans des tubes en plastique. De plus, afin de conserver un niveau de protection équivalent contre les maladies carieuses et parodontales, il faut respecter quelques principes importants, qui compliquent encore un peu plus la tâche pour trouver le bon produit.
Le principe à respecter pour conserver un brossage efficace et non traumatique est d’adapter la dureté du poil à la nature de la gencive. La gencive est comme la peau, il en existe des fines et des épaisses, des très fragiles ou des plus résistantes. C’est pourquoi il faut adapter le poil de la brosse à dents à chaque patient : très souple pour les gencives très fines ou pour les zones de récessions parodontales, et souples pour des gencives saines et normales (consulter la rubrique conseils de brossage).
De nombreux fabricants proposent désormais des manches en bois avec toute une gamme de duretés de poils. Il est donc aisé de trouver l’équivalent de sa brosse à dents en plastique avec un manche en bambou par exemple. Le critère à adapter à chacun est le diamètre du poil (Heasman 2015). Certains fabricants communiquent ce diamètre, il est alors exprimé en centièmes de millimètre. Les correspondances centièmes et dureté du poil sont les suivantes :
A défaut d’informations, il faut comparer la dureté des poils au toucher. En cas de doute sur la dureté des poils, n’hésitez pas à demander conseil à votre parodontiste. Dans tous les cas, l’enseignement à l’hygiène orale avec prescription de matériel adapté fait partie intégrante de tout traitement parodontal.
Toutefois, le manche en bois n’éliminera pas la totalité des déchets en plastique : la plupart des poils de brosse à dents sont en nylon. Le nylon est un polyamide dérivé du pétrole, et à ce titre polluant. Le nylon est largement utilisé dans le textile (collants, lingerie, doublures, coupe-vent, vêtements de sport). A ce jour, nous ne connaissons pas de brosse à dents sans poils en nylon. Mais certains nylons sont recyclables.
Le dentifrice sert à protéger les dents des caries grâce au fluor. Le fluor est le seul composé important du dentifrice, et trouver un dentifrice fluoré sans tube en plastique est très difficile en 2020. Après de multiples recherches, le seul que nous avons pu trouver est un dentifrice en tablettes solides, à faire fondre dans la bouche au début du brossage, et uniquement disponible à l’achat en ligne. La plupart des dentifrices solides disponibles sur le marché sont sans fluor. Or supprimer le fluor du dentifrice démultiplie le risque carieux.
LE POINT SUR LE FLUOR DANS LE DENTIFRICE
Le fluor a été introduit dans les dentifrices au début des années 70. Ce fluor est appelé fluor topique, c’est-à-dire qu’il est amené directement sur la surface des dents. Il ne faut pas le confondre avec le fluor systémique, qui est ingéré par l’organisme, le plus souvent avalé sous forme de cachets. Le fluor systémique est parfois controversé, il est en tout cas plus difficile de contrôler le dosage de fluor systémique, car il est présent dans l’eau du robinet et dans le sel de cuisine. C’est pourquoi les enfants ne doivent pas utiliser de dentifrice adulte, car ils en avalent trop.
Le fluor topique a fait chuter les courbes de caries par habitant de tous les pays développés qui ont utilisé ces dentifrices. Les preuves scientifiques de l’efficacité du fluor topique sont aujourd’hui très robustes, corroborées par de nombreuses études de haut niveau de preuve : en premier lieu, des études randomisées contrôlées comparent un groupe de patients qui se brosse les dents avec du dentifrice fluoré versus un groupe de patients qui se brosse les dents avec du dentifrice sans fluor, puis des revues systématiques et des méta-analysent compilent les résultats des premières, augmentant encore le niveau de fiabilité des résultats. Dans une revue Cochrane de 2009, les auteurs ont pu montrer que la suppression du fluor dans le dentifrice augmentait en moyenne de 50% le risque de caries.
Ainsi le fluor topique dans le dentifrice est utilisé quotidiennement par plus de 500 millions de personnes, et le résultat est une diminution importante du taux de caries par patients dans les pays qui ont généralisé son utilisation.
Les autres composés présents dans le dentifrice sont de moindre importance :
Ainsi, la plupart des patients peuvent utiliser un dentifrice solide au fluorure de sodium sans tube en plastique. Les patients à fortes sensibilités doivent utiliser un dentifrice désensibilisant en tube en plastique. Et les patients à haut risque carieux ne doivent pas se passer de dentifrices à plus haut taux de fluor (bifluorés, amines fluorées), et ne peuvent donc pas se passer de tubes en plastique.
Le paramètre essentiel d’une brossette interdentaire est le diamètre de la touffe de poils. Comme pour les brosses à dents, le manche peut être en bois, mais les poils restent en plastique. Certains fabricants proposent du plastique recyclable. Le fil dentaire est en revanche assez facilement trouvable en matière dégradable : pour le fil, la technique d’utilisation importe plus que la matière utilisée.
Ainsi la pollution zéro n’existe pas, mais il est aujourd’hui légitime de s’interroger sur le devenir des produits d’hygiène en plastique et à usage quotidien. Comme le souligne humoristiquement une bloggeuse « zéro-déchet », il est fort probable que votre première brosse à dent existe encore et soit enfouie quelque part, à moins qu’elle ne flotte quelque part près des Bermudes. Il est donc possible de réduire l’utilisation de dispositifs en plastique jetable pour l’hygiène dentaire, mais il reste à ce jour impossible de s’en passer complètement. Faisons le pari que la demande croissante du consommateur de produits sans plastique finira par modifier l’offre des fabricants, ou à défaut motivera le législateur à interdire le recours au plastique.